Grand trail des Templiers 2013
Grand trail des Templiers 2013
Je me suis inscrit très tard à cette course, quelques minutes avant la fin des inscriptions, sur un coup de tête, moins de 2 mois avant ce 27 Octobre.
La préparation n'a pas été orientée vers ce trail, mais les grosses sorties de l'été et les 2 podiums en raid (dont une victoire), me donne plutot confiance dans mes chances d'aller au bout.
En regardant le profil de la course on se dit que les 17 derniers kilomêtres vont être costauds. Autant les 22 premiers ne comportent qu'une montée, autant les 17 derniers en comptent 3.
Millau
Il fait chaud ce dimanche matin à Millau, 20°C à 4h30.
Le départ de la course et de ses 73km pour 3400 m de dénivelé positif (3 fois l'ascension de l'alpes d'Huez) approche, nous partons à 5h15.
Nous avons pris un gros orage en nous rendant à Millau depuis le cap d'Agde et je redoute de me faire rincer pendant la course j'ai déjà donné cette année (cf Raid'Obiwak).
"Le cap d'Agde?", allez vous me dire. Et oui, pour cette course Suzie et Lana ont décidées de venir me voir. Et le seul moyen pour elles de me suivre sur tout le parcours était donc d'embarquer dans la voiture d'Adeline et Jeremy. Eux ayant fait le choix de dormir au Cap d'Agde dans l'appartement familiale. Nous pourrons ainsi, Jérémy et moi partir à 3h du matin direction millau à 1h30 de voiture, pour prendre le départ. Les femmes et les enfants pourront partir plus tard pour nous voir au 2 éme ravitaillement.
Pourquoi je raconte ça? Tout simplement parceque l'organisation de ce qui gravite autour de la course a été ce qu'il y a de plus compliqué à gérer pour moi ce week end là.
Le départ
Premier choix à faire: où se mettre dans le peloton de départ et ses 2468 partants.
Un panneau indique : <= moins de 12h | plus de 12 =>
J'hésite à m'insérer au milieu des coureurs, à cet endroit comme je veux faire un départ prudent, mais j'estime à 11h30 mon temps de course.
Finalement j'avance un peu et je m'insère quelques 200 coureurs plus en avant. Ce qui sera ma plus grosse erreur (et regrets) de cette course, mais on le verra plus tard.
Feu!!! Le départ est donné, il fait une chaleur incroyable au milieu de cette masse de coureur et je transpire déjà à grosse gouttes alors que le rythme n'est pas très élevé.
2.5 km ça commence à monter, tout le monde cours, je cours aussi.
4.0 km, on court depuis même pas 20 mn et j'ai super faim, étrange... Les coureurs autour de moi doivent se demander ce que je fais à déjà manger une barre céréale. Cette première montée se fait sur un bon rythme, le chemin est assez large pour doubler et il fait chaud.
6.0 km on est sur le plateau, 10km roulant nous attendent, la vitesse est élevée, j'allonge la foulée dès que ça descends, et j'en profite pour doubler, je lève le pied dès que ça monte un peu, je gère mon effort.
15 km Je ne vois plus le halo de lumière de ma lampe frontale devant moi, il commence à faire jour. Le ciel est gris j'espère qu'on ne va pas se faire rincer
16 km la tuile, mon genou me lance terriblement, je ne peux plus courir, je m'arrête, je m'étire. Je recommence à courir et 500m plus loin la douleur m'oblige à m'arreter et m'étirer. S'en suivent 3km pendant lesquels j'alterne course, marche et étirements en pensant déjà au bout de combien de temps je vais jeter l'éponge. Est ce que j'arrête au 22ème? Est ce que je tente de courir jusqu'au 33ème où m'attendent les filles?
L'énervement remplace la deception. C'est pas possible, j'ai pas fais toute cette préparation, fais tout ces kilomêtres pour abandonner, il faut trouver une solution.
"Courir relaché, cours relaché" Je suis dans ma bulle, il faut trouver une solution. Et si je changeais de foulée, c'est risqué, mais de toute façon je ne pourrais pas aller bien loin comme ça. Et me voila au lieu de courir à l'économie en levant peu les pieds et en gommant le moindre geste superflux, courrant comme sur un semi-marathon, foulée bondissante, bras en mouvement.
J'entamme la descente sur le premier ravito, et la douleur s'efface! C'est pas possible ça fonctionne. Le moral revient, la foulée s'allonge, j'en profite pour regagner les places perdues pendant mes multiples arrêts étirements.
Mais comme si ça ne suffisait pas, l'aducteur commence à tirer et j'ai mal mis mes strappings aux chevilles, j'ai un point de frottement au niveau de la languette de la chaussure, je sens arriver l'ampoule. Il faut que je refasse mon strapping au prochain ravitaillement.
22 km (02h38 de courses | Prévu 2h40) Ravitaillement de Peyreleau
2h38 de course, sur un temps de passage prévu à 2h40, c'est parfait je suis dans les temps. Je recharge en eau, je mange un bout et j'en profite pour refaire mes strappings. Seulement 6mn d'arret pour tout ça et on repart.
J'appelle Suzie pour lui dire que je suis dans les temps prévus, mais que le genou fait mal et que je ne suis pas sur de voir l'arrivée aujourd'hui. Réponse : "Hé tu rigoles! On n'a pas fait tout ces km avec Lana pour que tu abandonnes". Bon il va falloir s'accrocher.
On attaque la dexième grosse côte de la journée, j'en profite pour sortir les batons, comme la majorité des coureurs à ce moment là.
L'ascension se fait sur un rythme pas très élevé, mais ça me convient. Arrivé sur le plateau, j'ai d'excellentes sensations, j'en profite pour relancer.
33km (04:30:14 de courses | Prévu 4h42) Ravitaillement de Saint andré de Vézine.
J'ai 12mn d'avance sur le chrono, tout va pour le mieux, la douleur s'estompe, il fait beau, presque chaud. Les filles sont là, je ne m'arrète pas longtemps. Juste le temps de recharger en eau et c'est reparti.
40km On en prends pleins les yeux
La course passe dans l'arche, la vue est magnifique.
Si on fait attention on voit le pont de Millau:
La descente sur la roque est assez technique:
43km La roque sainte margueritte
On passe dans un village où il règne une ambiance festive, les spectateurs hurlent, tambourinent, j'ai presque l'impression d'être en tête de la course. Tout les coureurs temporisent avant cette montée de 4 km qui doit nous emmener au prochain ravitaillement.
J'avais l'impression de ne pas pouvoir courir à mon rythme depuis 10km mais là c'est le pompom, il me faut attendre bien 30s avant de pouvoir rentrer dans le chemin. On fait 5m, on s'arrete 15s, on fait 2m on s'arrete 15s, et ça dure pendant bien 15mn. Et enfin on arrive à progresser sur un rythme lent mais sans s'arréter.
La légère descente qui plonge sur le ravito me permet de lacher un peu les chevaux et d'oublier un instant la frustation de ne pas pouvoir se donner à fond.
47km (06:59:03 | Prévu 6h48) Ravitaillement de Pierrefiche du Larzac
Incroyable, j'avais 12mn d'avance au précédent ravito, j'arrive à celui-là avec 11mn de retard. J'ai certe pris mon temps avant d'attaquer la côte, mais c'est surtout les bouchons qui m'ont fait perdre du temps, c'est frustrant, en plus je me sens bien, je me sens surtout beaucoup mieux qu'au 22eme km.
Suzie et Lana sont là, j'en profite pour manger une vrai collation, et non plus des barres ou gels énergétiques. Il me faut du salé, et quelque chose qui tienne le ventre, j'ai faim depuis le départ.
Le temps passe vite et après 20 minutes, je repars du ravitaillement en me disant : "C'est parti, il fait beau, on a fait plus de 47km, adieu les bouchons.
48km J'arrive dans une légère descente, peu technique et ça bouchonne, les coureurs devant moi sont à 7km/h, trop peu pour courir naturellement, mais pas assez pour marcher vite, et il est impossible de doubler. Dès que le chemin s'élargit j'en profite pour doubler, mais c'est peine perdue. A chaque fois que je double des coureurs, quelques centaines de metre plus loin, j'en rattrape d'autres quelques centaines de mêtres plus loin.
55km Quelque part dans les bois, c'est marrant, ça tangue. Si je veux finir, il faut que je m'arrête avant que je tombe dans les vapes, les médecins et les autres coureurs ne me laisseraient pas repartir.
Je m'arrête à peine 3 mn, le temps de manger un bout et de me réhydrater, je repars en marchant. 500m plus loin, je me sens déjà mieux, j'en profite pour recourir à nouveau. C'est dingue comment réagit le corps humain et comment on peut récupérer en si peu de temps.
Je regarde l'heure, et j'éssaye de réfléchir depuis combien de temps je cours. Je commence à être assez fatigué pour ne plus arrivé à faire des calculs. Au final, je sais que je suis en retard, mais j'ai de bonnes sensations, les paysages sont magnifiques, je suis convaincu que je vais finir, alors au diable le chrono, ce n'est désormais plus une préoccupation.
61km Massebiau (10h45 | Prévu 9h15)
On est à nouveau dans la vallée, on vient de subir une descente très technique. En s'accrochant aux arbres, aux cordes tendues entre les arbres. J'essaye de frainer avec les batons pour garder un maximum de cuisses pour la fin. Malgrès ces contraintes, je trouve le rythme du peloton très lents (moins de 5km en descentes...).
Je repars de Massebiau avec l'impression d'avoir des jambes neuves, je me sens super bien et j'ai bien envie de me faire plaisir en envoyant (comme on dit dans le jargon) dans cette côte qui sera la plus dur de la journée.
Le début est plutot large et j'en profite pour doubler quelques coureurs, puis le chemin se rétrécie et il devient à nouveau impossible de doubler.
Me voila à l'arrière d'un groupe d'une vingtaine de coureurs bloquer par quelqu'un au bout du rouleau et qui monte à 1km/h. Ce n'est pas une image il monte réelement à 1km/h. ça m'énerve et je décide de couper à travers la pente, entre les pierres, et les herbes hautes. Libre!!!!
... en fait non 2mn plus tard je me rattrape un autre groupe de 20 coureurs qui n'avancent pas. Je les doubles aussi comme je peux.
64km (11h35 | Prévu 10h05)
Ferme du cade, j'ai une heure et demi de retard, je ne le sais pas à ce moment là parceque j'ai arrété de regarder le chrono. En réalité j'ai perdu 20mn, parceque je me suis arreté plus longtemps que prévu aux ravitos, 20mn parceque des km ont été rajouté entre le 55eme et le 60eme km et que mes estimations de temps sont donc faussées. Enfin j'ai perdu une bonne heure à cause de ces maudits bouchons.
Je reste très peu de temps à ce ravitaillement, je recharge tout de meme encore un peu en eau. Et je repars en marchant et en mangeant.
On est sur un faut plat montant et un chemin large, on peut enfin courir à notre rythme!! Je discute avec un coureur qui devait être aussi frustré que moi pour courir à une telle vitesse à ce moment de la course. Le faux plat devient descendant et l'autre coureur me demande si je me sens d'allonger un peu la foulée, et nous voila en train de courir à une vitesse de semi-marathon.
La pente s'accentu et notre vitesse aussi, on double comme des malades dans la descente, les autres coureurs ne doivent pas comprendre pourquoi on fait ça, mais lui comme nous éclatons à courir à cette vitesse. De toute façon avec le peu de kilometre qu'il reste on est sûr de finir.
68km Montée vers l'antenne
La nuit approche et je fais part de mon inquiétude à Bertrand avec qui je cours depuis 4km. J'ai laissé ma lampe frontale à ma femme au ravito du 47eme. Je pensais arriver de jour, mais ce ne sera pas le cas.
"Ne n'inquiète pas je t'éclairerais pour les derniers kilometres" me lance-t-il.
Nous bouchonons encore dans cette montée. Il faut dire que les marches de 40 à 60cm ne nous facilitent pas la tache.
70km Début de la descente finale
Il commence à faire nuit, je n'y vois pas grand chose, mais je peux courir à faible allure.
Je traverse la grotte du hiboux, à taton, dans le noir quasi complet. Les marches me surprennent à chaque pas.
A la sortie de la grotte, un panneau "Descente dangereuse" nous informe que la course est encore loin d'être finies. Un bénévole me dit "Sortez votre lampe frontale, la descente est très dangereuse".
"Je n'en ai pas pas."
"Vous n'avez pas de frontale??"
Heureusement c'est à ce moment là que Bertrand arrive et me lance : "Vas y Rémi, je t'éclaire".
Voici la sortie de la grotte vue du bas:
Et vue du haut:
De nuit c'est vrai que ce n'est pas simple, de là à être dangereux, nous n'avons pas la même notion du danger.
Bertrand est dérrière moi pour éclairer, mais ma propre ombre me gène pour voir le relief. Je cours en faisant des bonds pour éviter les racines et toucher le moins longtemps possible le sol pour éviter de me fouler une cheville. Bien que je me sois strappé les 2 chevilles, abandonner à ce moment là serait un drame.
Le dernier kilomêtres est roulant, on en profite, pour allonger la foulée.
73km Arrivée!!
Il fait nuit, il y a du monde, le couloirs dans les derniers mêtres se ressère tellement il y a de spectateurs au bord du chemin, c'est à peine si on devine la suite de l'itinéraire. On se croierait presque dans les derniers kilomêtres de l'Alpes d'Huez.
Les gens hurlent et nous félicitent, alors qu'ils ne nous connaissent même pas. C'est ça l'ambiance Trail et Ultra-Trail, je vois Suzie sur le côté qui m'encourage, plus que 10m à faire en compagnie de Bertrand et on passe ensemble le portique d'arrivée très reconnaissable des Templiers.
Je finis 1404/2468 en 13h21mn50s. 2053 coureurs franchiront la lignes pour 415 abandons.
Au final, j'ai bien mérité ma médaille Finisher et mon tee-shirt finisher.
Si je fais un bilan de ma course je suis assez mitigé entre le sentiment d'avoir été freiné par les bouchons et le regret de ne pas m'être positionné plus en avant du paquet sur la ligne de départ. Et le sentiment d'avoir bien géré ma course sur sa longueur et d'avoir pris du plaisir et n'est ce pas ça le plus important?
Le reportage de sport+ sur les templiers: